L’huile d’avocat est-elle vraiment meilleure pour la santé? - Science et Fourchette
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L’huile d’avocat est-elle vraiment meilleure pour la santé?

On la dit riche en “bons gras”, résistante à la chaleur, bonne pour le cœur et pour la peau. L’huile d’avocat s’est taillée une place sur les tablettes aux côtés de l’huile d’olive. Certains l’utilisent même pour remplacer l’huile d’olive, convaincus d’avoir trouvé “mieux”.

Mais entre la promesse d’un gras parfait et la réalité d’une culture qui épuise les sols, il y a beaucoup de choses à dire. Est-ce un simple effet de mode ou un vrai atout pour notre assiette?

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Mots de Annie Ferland, PhD, DtP-nutritionniste


Le fruit devenu huile de luxe

À l’origine, l’huile d’avocat n’était pas un produit de cuisine. Elle servait d’abord à l’industrie cosmétique et pharmaceutique, grâce à sa texture riche et sa capacité à hydrater la peau. Ce n’est que dans les années 1990-2000, que les techniques d’extraction à froid ont permis son arrivée dans nos cuisines. L’engouement pour les “bons gras” et les superaliments a fait le reste.

L’avocat, fruit originaire d’Amérique centrale, renferme naturellement une forte proportion de matières grasses, soit environ 15 à 30 % de sa chair selon les variétés, ce qui correspond à près de 60 % sur base sèche. De cette pulpe verte, on extrait une huile douce, souvent d’un vert doré, au goût légèrement beurré. Contrairement à la plupart des huiles végétales (obtenues à partir de graines ou de noyaux), celle-ci provient de la chair du fruit lui-même. Et c’est tant mieux, parce qu’on le rappelle, le noyau d’avocat, lui, ne se mange pas.

Mais derrière cette apparente simplicité se cache une réalité industrielle plus complexe. Pour produire un seul litre d’huile d’avocat, il faut une quantité surprenante de fruits. Selon la variété et la méthode d’extraction, on parle d’environ 15 à 30 avocats, parfois davantage. L’avocat Hass, plus riche en matières grasses, offre le meilleur rendement, mais la production reste énergivore, surtout quand on songe à la quantité d’eau nécessaire à la culture et au transport de ces fruits souvent venus de loin.

65 % de bons gras et une bonne tolérance à la chaleur

Sur le plan nutritionnel, l’huile d’avocat se distingue par sa teneur élevée en acides gras monoinsaturés (environ 65 %), principalement de l’acide oléique. Il a un profil en acides gras comparable à celui de l’huile d’olive et de tournesol oléique. Ces “bons gras” sont reconnus pour contribuer à la santé cardiovasculaire. Ils aident à réduire le cholestérol LDL (le « mauvais ») sans abaisser le HDL (le « bon »).

L’huile d’avocat contient aussi des phytostérols, de la vitamine E et des caroténoïdes qui participent à ses effets antioxydants. Mais sur ce plan, elle ne se démarque pas vraiment. Presque toutes les huiles végétales en contiennent. L’huile d’avocat doit donc sa réputation non pas à un ingrédient miracle, mais à un ensemble équilibré de bons gras et d’antioxydants, semblable à d’autres huiles végétales.

Mais elle possède un avantage de taille en cuisine, sa résistance à la chaleur.

Son point de fumée (la température à partir de laquelle une huile se dégrade) atteint environ 270 °C pour les versions raffinées. C’est l’un des plus élevés parmi les huiles végétales, ce qui la rend particulièrement stable pour les cuissons à la poêle, les sautés et les grillades. En réalité, on ne cuisine jamais à une température aussi élevée (une cuisson à feu vif tourne autour de 180 à 200 °C).

Il existe aussi des huiles d’avocat non raffinées, souvent vendues comme “extra-vierges” ou “pressées à froid”. Elles conservent la couleur verte et le goût herbacé du fruit. Leur point de fumée est plus bas, autour de 190 à 215 °C.

Une huile dispendieuse

Au moment où l’épicerie coûte de plus en plus cher, il faut parler du prix de l’huile d’avocat. Grosso modo, elle coûte entre 2 et 3 fois plus cher que l’huile d’olive ou de canola à qualité équivalente. On parle de 2,40$ à 6,00$ du 100 ml (selon la qualité de l’huile), contre 1,96$ à 3,20$ pour une huile d’olive et 2,01$ pour une huile de tournesol oléique. Cette différence s’explique en partie par le rendement faible du fruit, mais aussi par les coûts de production et d’importation.

Et la qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Une étude de l’Université de Californie à Davis a révélé que 82 % des huiles d’avocat analysées sur le marché américain étaient déjà rances ou mélangées à d’autres huiles avant même leur date de péremption. Autrement dit, payer plus cher ne garantit pas toujours la pureté du produit. Dans certains cas, on parle carrément de fraude alimentaire puisque des huiles étaient diluées ou faussement étiquetées comme “100 % pur avocat”, alors qu’elles contiennent du soya ou du tournesol. Mais la plupart du temps, il s’agit plutôt d’un problème de conservation ou d’absence de norme claire. Contrairement à l’huile d’olive, l’huile d’avocat n’a pas encore de standard international pour encadrer sa qualité et son étiquetage.

Le revers écologique du fruit vert

L’huile d’avocat n’échappe pas aux critiques environnementales qui touchent déjà l’avocat lui-même. Sa production exige beaucoup d’eau et contribue dans certaines régions à la déforestation et à la perte de biodiversité. Certaines entreprises travaillent à améliorer la durabilité de la filière en récupération des fruits qui ne rencontrent pas certains standards de beauté pour l’huile, réduction de la consommation d’eau, certifications éthiques (Fair for Life, Rainforest Alliance). Mais ces pratiques restent minoritaires, et le transport longue distance demeure un enjeu.

L’huile d’avocat est une option intéressante sur le plan nutritionnel, mais pas nécessairement la plus durable sur le plan environnemental.

L’huile d’avocat, un choix santé mais pas unique

Si on la compare à d’autres huiles, l’huile d’avocat a tout pour plaire. Bons gras, antioxydants, stabilité à la chaleur et goût doux. Elle rivalise sans peine avec l’huile d’olive ou l’huile de tournesol oléique. Mais parler de “meilleure huile pour la santé” serait exagéré. Elle fait partie du club des bonnes huiles, celles qu’on gagne à varier selon l’usage et le goût … si notre porte-feuille peut se le permettre.

Le plus important n’est pas de choisir “la bonne huile”, mais d’utiliser LES bonnes huiles. Celles qui s’intègrent dans une alimentation riche en végétaux, pauvre en aliments ultratransformés, et où les graisses sont consommées avec modération. C’est un bel ingrédient, à manipuler avec respect et conscience, pour le corps, et pour la planète.


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Références consultées

Dreher ML, Davenport AJ. Hass avocado composition and potential health effects. Crit Rev Food Sci Nutr. 2013;53(7):738-750. doi:10.1080/10408398.2011.556759

Wang SC, Tian Y, Miller SA, Awad TS, Kang D, Kim JH, et al. First report on quality and purity evaluations of avocado oil sold in the US. Food Control. 2020;110:106982.

Flores M, Saravia C, Vergara CE, Avila F, Valdés H, Ortiz-Viedma J. Avocado Oil: Characteristics, Properties, and Applications. Molecules. 2019;24(11):2172. Published 2019 Jun 10. doi:10.3390/molecules24112172

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