Les œufs et le cholestérol, faut-il encore les limiter? - Science et Fourchette
On tranche!

Les œufs sont-ils mauvais pour le cholestérol ?

Les œufs. Est-ce qu’on peut en manger tous les jours? Faut-il les limiter? Est-ce qu’ils font vraiment monter le cholestérol?

On les a accusés d’épaissir le sang, de bloquer les artères, de boucher le cœur.

Pendant près d’un demi-siècle, les œufs ont été considérés comme l’aliment à surveiller si on voulait éviter de faire grimper son cholestérol sanguin, ou pire, mourir du cœur. Pourtant, même si la science a tranché depuis longtemps (oui, on peut manger des œufs sans crainte) la peur, elle, est restée. Mais là, il est temps de bien comprendre toute cette histoire… et de se faire rassurer une bonne fois pour toutes.

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mots de Annie Ferland, PhD, DtP-nutritionniste


Pourquoi on a dit que les oeufs faisait monter le cholestérol

Si les œufs ont eu si mauvaise presse, c’est parce que, dans les années 1950 à 1960, au moment où les maladies cardiovasculaires explosaient, les scientifiques cherchaient des responsables. Et ils ont trouvé un coupable commode, le cholestérol. Parce que les plaques qui obstruent les artères en contiennent, on a cru que manger du cholestérol (celui qu’on trouve dans les jaunes d’œufs, le beurre ou la viande) faisait forcément monter celui du sang.

Le lien semblait logique, même s’il n’était pas encore prouvé. Mais il y avait quelque chose de rassurant. Si le cholestérol était le problème, il suffisait de l’enlever de l’assiette.

Pourquoi les oeufs et pas d’autres aliments

Parmi tous les aliments riches en cholestérol, les œufs se sont vite retrouvés au banc des accusés. Pas parce qu’ils étaient les plus dangereux, mais parce qu’ils étaient les plus faciles à mesurer. Un seul jaune contient environ 250 mg de cholestérol, presque la totalité de la limite fixée plus tard par les experts. Symboliquement, l’œuf incarnait donc le problème. Et puisque les œufs faisaient partie du déjeuner de presque tout le monde, ils devenaient le coupable universel.

Visible, concret, et facile de dire de ne pas en manger.

Les oeufs, à consommer avec modération?

En 1968, l’American Heart Association (un regroupement d’experts médicaux qui établit encore aujourd’hui les grandes lignes de prévention des maladies du cœur) publie un petit livret intitulé Diet and Heart Disease. Pour la première fois, on recommande au grand public de limiter le cholestérol alimentaire à 300 mg par jour et de ne pas dépasser trois œufs entiers par semaine. Mais ce chiffre, comme le nombre d’œufs, ne vient pas d’une découverte scientifique. C’est le résultat d’un compromis entre experts, soucieux de proposer une recommandation prudente.

Et sur papier, ça semblait logique! Si le cholestérol dans le sang est dangereux, il faut réduire celui dans l’assiette.

Pour protéger son cœur, il fallait donc manger moins d’œufs.

Il faut le dire, c’était une hypothèse bien intentionnée, formulée par des chercheurs qui cherchaient sincèrement à sauver des vies. Mais cette précaution est vite devenue une vérité. Et elle a été officialisée comme une recommandation nutritionnelles pendant près de 20 ans.

On peut maintenant manger des oeufs

Mais au fil du temps, couper les oeufs ne fonctionnait pas. La population mangeait moins de cholestérol… sans que les maladies du cœur diminuent pour autant. Les chercheurs ont alors commencé à douter que les œufs et le cholestérol soient réellement les coupables.

Dans les années 1980 et 1990, de nouvelles études épidémiologiques ont montré que le cholestérol total n’était pas le meilleur prédicteur du risque cardiovasculaire. En gros, ça veut dire qu’il n’y avait pas de lien entre cholestérol alimentaire et cholestérol sanguin.

« Aujourd’hui, on sait que les œufs ne font pas monter le cholestérol sanguin. La science montre qu’on peut en manger jusqu’à un par jour, sans risque pour la santé du cœur, à condition que le reste de l’alimentation soit équilibré. »

Quelques études ont bien tenté, par la suite, de ramener les œufs sur le banc des accusés, mais elles ont été fortement critiquées pour leurs biais méthodologiques. Et surtout, les grandes études de cohorte, regroupant des millions de participants, ont démontré qu’une consommation modérée — environ un œuf par jour — n’augmentait pas le risque de maladie du cœur.

La conclusion s’imposait d’elle-même. Ce n’étaient ni les œufs ni le cholestérol alimentaire qui posaient problème, mais l’ensemble du mode de vie. Trop de gras saturés, pas assez de fibres, trop de sodium, trop de sucre ajouté, fumer, et ne pas bouger assez.  Voilà ce que la science pointe aujourd’hui comme les véritables habitudes à modifier.

Manger des oeufs aujourd’hui

Et depuis que les œufs ont fait leur grand retour, portés par leur faible coût et leur teneur élevée en protéines, un nouveau défi est apparu. On en mange parfois bien plus qu’avant (heureusement!). Les études actuelles ne permettent pas encore de dire avec certitude ce qui se passe au-delà de 1 œuf par jour, simplement parce que ce n’est pas une habitude courante dans les cohortes observées. Mais puisque les données disponibles vont toutes dans le même sens, on peu émettre l’hypothèse que ce n’est pas le nombre d’œufs qui compte, c’est la qualité globale de l’alimentation. Et chez les plus grands mangeurs d’œufs étudiés, les effets demeurent neutres lorsque le reste de l’assiette est équilibré … et que les oeufs ne nuisent pas à la variété.


La Mini FAQ Science et Fourchette

Les œufs font-ils monter le cholestérol sanguin ?

Non. La science montre qu’une consommation d’un œuf par jour n’augmente pas le risque cardiovasculaire chez les personnes en santé.

Combien d’œufs peut-on manger par semaine ?

Jusqu’à un œuf par jour, selon les grandes études de cohorte, sans impact négatif sur la santé du cœur.

Faut-il éviter les jaunes d’œufs ?

Non. Le jaune contient des nutriments essentiels comme la choline, la lutéine et la vitamine D, bénéfiques pour la santé.

Et si j’ai du cholestérol élevé ?

Il faut plutôt surveiller la qualité globale de l’alimentation : gras saturés, fibres et habitudes de vie jouent un rôle bien plus important.

Et si je suis diabétique, est-ce que je dois limiter les œufs ?

Les premières études avaient soulevé un doute, mais la recherche récente ne montre pas de lien clair entre la consommation d’œufs et le risque cardiovasculaire chez les personnes diabétiques. Ce qui compte, c’est la qualité globale de l’alimentation: plus de végétaux, de fibres et de bons gras, et moins de gras saturés, de sodium et de sucre ajouté. Dans ce contexte, un œuf par jour peut tout à fait s’intégrer à une alimentation équilibrée, même en présence de diabète.

Références consultées

Dietary goals for the United States, second edition, 1977: a reaction statement by the American Dietetic Association. Diabetes Care. 1979;2(3):278-282. doi:10.2337/diacare.2.3.278

Hu FB, Stampfer MJ, Rimm EB, et al. A prospective study of egg consumption and risk of cardiovascular disease in men and women. JAMA. 1999;281(15):1387-1394. doi:10.1001/jama.281.15.1387

McNamara DJ. The Fifty Year Rehabilitation of the Egg. Nutrients. 2015;7(10):8716-8722. Published 2015 Oct 21. doi:10.3390/nu7105429

Tobias DK. What Eggsactly Are We Asking Here? Unscrambling the Epidemiology of Eggs, Cholesterol, and Mortality. Circulation. 2022;145(20):1521-1523. doi:10.1161/CIRCULATIONAHA.122.059393

Drouin-Chartier JP, Chen S, Li Y, et al. Egg consumption and risk of cardiovascular disease: three large prospective US cohort studies, systematic review, and updated meta-analysis. BMJ. 2020;368:m513. Published 2020 Mar 4. doi:10.1136/bmj.m513

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